Butins et cætera - chapitre 4

Par delà les frontières

Le 30/07/2009

Ailleurs et au moment même, tel qu’il fut fixé sur agenda, Lee-On franchit le pas de la porte. Sa future patronne, car il ne pouvait en être autrement (l’homme avait la certitude que la place ne pouvait lui filer sous la plante des pieds), finissait de chausser une cliente volage. Mic savait drôlement y faire, en experte, dans le port du talon et cheville. Lee-On l’aperçut laissant fuir son regard nonchalant pour palper la nudité haute et intérieure de cette cuisse chalande, cette fois-ci, que délimitait un haut de bas de soie suie soutenu par une jarretelle chair.

« Ces escarpins de compèt’ vous feront franchir le Rubicon, les autres grolles vous permettraient tout juste de labourer les berges du Styx, » commenta Mic.
La dame à chausser se leva. Un premier pas et un coquin courant d’zef souleva un pan de sa robe porte-en-feuille. Un prompt geste la rassura aussitôt de n’avoir pas eu à dévoiler en veux-tu en voilà, et au monde entier, les harmonieux reliefs de son sexe dénudé. De culotte, Isa Braune ne portait point, une fantaisie vestimentaire qu’elle s’accordait de temps à autre, après avoir lissé dans l’instant matinal les bas gainant déjà ses longues jambes portées par les talons de ses souliers vernis. Elle huilait alors le bout de ses doigts, brillantinait sa touffe en crête, douce nostalgie d’un bref passé punk, finissait de s’habiller, maquiller et coiffer, devant la glace de l’armoire de famille, pour filer au boulot, le « poil ainsi à l’air ». C’était son expression. Isa Braune n’était assurément pas la cocotte qu’on croyait !

« Un empire m’attend. Je prends les deux, passe à la caisse et reviendrai pour les casseroles », fit la dame Braune.
« Brillante idée ! Au plaisir et à la joie de nous croiser sous peu », fit la chef de la boutique en glissant les biffetons en caisse.
« Ah vous voilà ! fit-elle à l’apprenti chausseur. Allons nous entretenir à l’entresol, c’est là, dans ce coquet coin, que j’ai installé mon bureau ! » Mic s’assit à mi-fesses, jambes croisées, la droite sur la gauche, ah, non, tiens ! la gauche sur la droite. Elle circumnavigua alors avec envie dans les moindres recoins du popotin joyeux, lunaire et savoureux (1) de son hôte pour en extraire ce qui lui parut être le bon élément à charge pour l’emploi à pourvoir.

« Vous fûtes donc liftier au gouffre de Padirac, Dordogne, naviguiez du rez-de-chaussée, voilà déjà un excellent point pour prétendre à une belle carrière dans la chouze, à moins soixante-quinze mètres sous le niveau de la mer, où vous déversiez, au fond du Causse du Gramat, des ribambelles de va-nu-pieds. Second et définitif bon point ! Certes le samedi ça bosse, mais c’est aussi le jour des toilettes élégantes, des clients et clientes pomponnés, trente-cinq heures payées quarante-deux, intéressement à la vente, à la paire, au cirage, embauchoirs. Cela vous irait-il ? »
« Comme vous y allez vite, madame ! Ne ferait-on pas d’essais grandeur nature, pour jauger de la justesse, à plus ou moins une taille, de mes appréciations du premier coup d’œil, de la pointure à pourvoir ? Apprécier mon style de grimpe, comment j’gravis, dandinant d’la fesse carnassière les barreaux de l’échelle pour soustraire à l’équilibre précaire une boîte du sommet de sa pile ? »
« J’ai confiance. Et puis la trop jolie Zélie vous guidera à merveille, à l’échéance. Signez-là et bisons-nous », fit-elle, yeux clos, en tendant les lèvres.

Lee-On dit : « Oui ! Sûr ! D’ac’ ! » et il lui proposa, de la même manière qu’il avait pioché le sein de Zélie, de lui embrasser le sexe jusqu’à satiété. « Détrousse tout l’emballage alors », le commanda-t-elle en chef.
Lee-On se précipita avec gourmandise. Mic le fit dinguer d’un précis coup de pied. Aïe !
« Prends ton temps homme pressé », lui dit-elle son sexe dans sa main, sans qu’il comprenne bien par quelle entourloupe elle avait réussi à choper le braquemart. Il n’était pas sûr, mais peut-être lui avait-il dit :
« Votre beauté me transit au point de ne pouvoir esquisser le moindre geste. Je crains, en fait je m’en réjouis, qu’il faille que vous alliez de votre propre chef extirper mon zizi. »

Là aussi, ça devenait une manie, il fallait reprendre tout au début. Presque au ralenti. Lee-On prit ses lèvres à pleine bouche avec la précision d’un Soyouz en phase d’arrimage à la station orbitale. Sa langue de caméléon furetait, traînait son indécision sur les pourtours de sa fente encore engourdie. Elle, désinvolte, grignotait un tout petit bout de jonc, plein d’aplomb. Elle pipait, comme elle disait les mots, avec douceur et saveur. C’était agréable. Les corps voluptueux, posés à même une carpette du pays des Perses, basculèrent. La joue droite de Lee-On reposait désormais sur le haut de la cuisse gauche de Mic, bien carrée au creux de son aine. Avec le sentiment de voleter dans un champ de tournesols sous un chaud soleil de midi, il lapait, à belles goulées régulières, le suc de son sexe désormais parfaitement épanoui. Un taquet de sa longue langue épointée fit vibrionner son petit loquet. Paf, la voie était définitivement ouverte.

« Ne me confieriez-vous point vos seins maintenant ? » fit-il en s’y agrippant pour entamer sa remontée.
« Je ne scinde pas le corps de l’esprit, lui dit-elle, confuse de plaisir. Mes seins font corps avec mon corps. Je ne sais si je pourrais m’en séparer ainsi et si je peux vous faire confiance ! Et il vous faut d’abord tâter du téton à petits pas, non pas malaxer en long du mamelon. L’un n’allant pas à l’usage sans l’autre certes, mais il faut savoir prendre les choses dans l’ordre des choses. »
« Qu’allez-vous faire », s’inquiéta-t-il tout à coup ? « Vous faire signer l’contrat pour taffer à l’étal, glisser en pieds par milliers ballerines et mules, faire grimper le chiffre au plus haut des échelles de Richter et du Dow Jones réunies. »

Les ébats étaient clos. Lee-On aida Mic à remettre tout en plis pour garder vif les échos de ce brouhaha. Il pinça ses bas aux jarretelles pour leur rendre la belle tenue qu’ils avaient avant la mise en bazar, puis fit de même avec ses tétons, entre index et majeur, juste assez pour qu’ils saillent sous son corsage rajusté, le temps de dévaler l’escalier et de se souhaiter un « au revoir » du bout des lèvres. « À d’main ». « À d’main ».

Zélie chuchota aussi son « À d’main » accompagné d’un discret geste papillonné de la main à hauteur de hanche. Lee-On s’éloignait. Mic et Zélie se calèrent bras dessus-dessous, seins gironds tout contre, assurées de tenir là une recrue de choix, sûres augures de subir, sous peu, de délectables tourments. Zélie lui plaqua un chaud baiser sur la joue.

(1). Cul rit cul hum, autrement dit

[gris]Camomille Belleplante[/gris]