Madonna : leçons de sexe & leçons de genre

Le 12/11/2011

A l’occasion de la sortie prochaine d’un film réalisé par Madonna, W.E., cette dernière livre sa vision de la sexualité féminine (entre autres choses) dans le dernier numéro du magazine américain Harper’s Bazaar.

L’icône de la provocation à bon escient a réalisé un film sur Wallis Simpson parce que des années plus tard les anglais restent encore profondément choqués par la vie de cette femme. "Je crois que ma vie et mon style dérangent les normes sociales, comme le film aussi" dit-elle.
Peu importe le film (jusqu’à ce jour le cinéma n’a jamais été son point fort), ce qui compte, ici, c’est l’intention : celle d’inverser les rôles victimes / bourreau, hommes / femmes, objets de désirs / sujets désirants, au fond la marque de fabrique du travail salvateur de Madonna, quel que soit le domaine dans lequel elle exerce.

"Dans toutes les différentes choses que j’ai faites, ou dans les façons que j’ai trouvées pour m’exprimer, je me suis toujours heurtée à de la résistance. Le monde n’est guère à l’aise avec la sexualité féminine. C’est toujours le point de vue masculin qui s’exprime, la femme apparait en objet et on dirait bien que les femmes sont à l’aise avec ça. Quand une femme s’exprime, aussi paradoxal que cela puisse être, il semble que cela dérange les femmes (....). Je pense que cela vient essentiellement de la façon dont nous avons été conditionnées. Ne pas avoir eu de mère m’a aidé en ce sens, car je n’avais pas de modèle de femme sur lequel me construire (...). Je voyais mes frères libres de tout faire, tandis qu’on dictait aux filles tous les comportements à avoir et les tenues à porter. Une des sempiternelles phrases de mon père était - je l’aime vraiment mais il est très vieux jeu - "s’il y avait plus de vierges, le monde serait meilleur" (...). Sachant tout ce qu’une fille devait faire à l’école pour être populaire, j’ai décidé de faire le contraire. J’ai refusé de me maquiller, de me coiffer, de me raser. J’ai gardé mes poils sous les aisselles".

De cette attitude à contre-courant, rebelle, dirait certains, elle a tiré forces et difficultés, à commencer par celle de séduire qui n’est venue qu’avec la notoriété. C’est cette façon de s’imposer par la différence, comme elle, qui lui a donné envie de faire un film sur Wallis Simpson, dont la réputation de sorcière sexuelle était uniquement bâtie sur le fait qu’elle était puissante. "Lorsque les femmes sont senties comme étant puissantes et faisant des choses qu’elles ne sont pas censées faire, on parle souvent de prédatrices sexuelles (...) et c’est ce qu’on a dit d’elle parce que les gens ne pouvaient pas comprendre comment cette roturière avait séduit un roi, sans être particulièrement belle, avec un corps assez masculin, deux fois divorcée, et ménopausée lorsqu’elle a épousé Edouard VIII. Qu’avait-elle à offrir n’étant ni jolie, ni fertile, ni vierge, donc parfaitement inutile ? "
Une rengaine que la chanteuse-réalisatrice connait bien "Je remarque que lorsque les gens écrivent des choses sur moi, il y a toujours mon âge juste après mon nom. Comme s’ils étaient en train de dire "la voilà, mais souvenez-vous qu’elle n’est plus dans la course" ou bien "punissons-là en lui rappelant son âge et en le rappelant à tout le monde". Quand on indique l’âge de quelqu’un, de fait on le limite".
Les mal intentionnés peuvent continuer à indiquer l’âge de Madonna en parlant d’elle, elle continue d’être une de celles qui ont fait le plus pour aider les femmes à débrider leur sexualité. Ce n’est pas son âge qui va la réfréner, il se pourrait bien plutôt qu’elle vieillisse comme un bon vin.

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