L’odeur de l’excitation

Le 19/08/2021

Le désir, tel qu’il est décrit de façon stéréotypée, reposerait avant tout sur le langage corporel et des stimulations visuelles. On encourage des efforts esthétiques (vêtements, coiffure, maquillage, etc.), en ignorant le rôle des signaux chimiques qui indiquent de façon olfactive l’excitation sexuelle.
Car l’excitation a une odeur.

Une étude (menée conjointement par les départements de Psychologie de l’Université de Kent, au Royaume Uni et de la Pennsylvania State University,aux USA), publiée en 2020 dans les Archives of Sexual Behavior suggère que les hommes font la différence entre une femme excitée sexuellement ou pas, simplement en sentant sa sueur, laquelle émet des signaux chimiques qui la rend plus excitante. L’expérience a montré que l’exposition à ces signaux augmentait l’excitation et la motivation sexuelle des hommes. La stimulation visuelle n’est pas nulle : sans surprise aucune, les hommes ont accordé plus d’attention aux femmes peu vêtues ou dans des poses séduisantes, mais les deux auteurs de l’étude, Arnaud Wisman et Ilan Shrira, ont cherché à savoir comment les signaux chimiques sexuels peuvent fonctionner comme un canal supplémentaire dans la communication de l’intérêt sexuel et comment les facteurs contextuels peuvent influencer la dynamique de la communication sexuelle humaine.
Ils ont demandé aux participantes de ne ne pas fumer, boire ou manger épicé ou aillé et de s’abstenir de tout rapport sexuel pendant les 48 h précédant l’étude. Ensuite, elles ont du pédaler sur un vélo au maximum de leur capacité avant de regarder des films X. Sept jours plus tard, l’opération était répétée avec des films neutres. Les échantillons récoltés étaient ensuite donnés à des hommes pour évaluer leur excitation.
Dans l’ensemble, les expériences ont montré que les hommes trouvaient l’odeur des femmes sexuellement excitées plus attrayante, ce qui augmentait en retour leur propre excitation, montrant en résumé que l’excitation sexuelle des femmes conduit à la libération d’un parfum qui augmente la motivation sexuelle des hommes.
Les réactions symétriques des femmes ont été étudiées en 2008 et, pour une raison qui nous échappe, les auteurs de toutes ces études semblent vouloir séparer les comportement des unes et des autres. La sueur d’hommes sexuellement excités et non excités avait été présentée à des femmes de façon à peu près similaire, mais en surveillant l’activité cérébrale de ces dernières. Les résultats ont montré que la sueur d’hommes sexuellement excités activait les substrats neuronaux impliqués dans le traitement des stimuli sexuels (l’hypothalamus), portant les auteurs à conclure que l’excitation sexuelle entraînait chez les hommes l’émission de sueur porteuse d’un signal chimique lié à la signalisation sexuelle. En bref, le cortex orbitofrontal droit, le cortex fusiforme droit et l’hypothalamus droit réagissent à la sueur sexuelle humaine naturelle en suspension dans l’air, ce qui indique que ce composé chimio-sensoriel est codé de manière holistique dans le cerveau. Bien que les études aient été menées séparément, les résultats montrent dans les deux cas que des significations socio-émotionnelles et sexuelles, sont véhiculées par la sueur humaine.

De plus en plus de recherches suggèrent qu’hommes et femmes, comme les animaux, peuvent se communiquer des informations au moyen de signaux olfactifs. Des fluides corporels volatils comme l’urine, le sperme ou la cyprine peuvent augmenter l’excitation des partenaires. Les odeurs libérées par le corps transmettent également des informations sur la santé physique, la fertilité et la parenté génétique d’une personne, tout comme elles indiquent des états émotionnels, comme par exemple la peur, ou encore les larmes (dont l’odeur fait fuir les hommes !). Les émanations corporelles seraient un canal de communication supplémentaire, incitant les personnes à proximité à réagir de manière adaptée. Les signaux chimiques que nous émettons en fonction de nos états émotionnels sont non seulement détectables, mais nous finissons par agir en fonction de ces détections, par intérêt sexuel, par dégoût, par empathie ...

Cette étude montre également que l’excitation sexuelle présente de nombreux traits caractéristiques des émotions : un état motivationnel-affectif de courte durée suscité par des stimuli particuliers, avec un système d’interdépendance entre sa physiologie et son expression. Être "sexuellement excité.e" est à présent scientifiquement classé comme un état physique émotionnel.
Elle montre aussi que "avoir du pif" n’est pas une vaine expression, et que l’olfactophilie (excitation sexuelle mue par les odeurs émanant du corps) ne serait rien d’autre qu’une communication saine et naturelle entre des êtres qui se cherchent et se trouvent ...