Françoise Rey

Le 18/03/2009

En 1989, La Femme de Papier, écrit par une inconnue, révolutionne le monde de la littérature érotique féminine. Son écriture sensuelle et terriblement érotique prouve que les hommes ne détiennent plus le monopole des situations transgressives et provocantes. Elle devient avec sa première publication la « Grande Dame » de la littérature érotique. Après quelques années de silence, Françoise Rey publie mi-novembre Des Guirlandes dans le sapin aux Editions Blanche, l’occasion pour nous de la rencontrer. Elle nous parle de ses goûts, de son œuvre, de son statut d’écrivain érotique. Auteure de plus d’une vingtaine de romans et nouvelles érotiques, La Femme de Papier est avant tout La Femme de Passion… Passion du désir d’être elle-même, de la liberté d’avoir un sexe… et du plaisir d’en jouir.

Quelles sont les circonstances qui vous ont amenée à écrire "La Femme de papier" ?

Vers 35 ans, j’ai traversé une crise existentielle et multiple très forte que je considère comme une seconde puberté. Il s’est alors passé beaucoup de choses dans ma vie et, écrire ce premier livre a été synonyme d’explosion, une révolte intérieure aboutissant à une véritable renaissance. Comme une espèce d’éclatement de ma chrysalide…

Il s’agissait donc d’un ouvrage érotique, rédigée par une femme « anonyme », professeur de français. Comment cette "Femme de Papier" a-t-elle autant fait parler d’elle ?

C’est toute une histoire ! J’ai d’abord d’envoyé mon ouvrage à Régine Desforges dont je connaissais la réputation. A mon avis, si quelqu’un pouvait publier un livre érotique de femme, c’était bien elle. J’ai donc posté mon unique manuscrit, par ailleurs tapé de façon très brouillonne. Le temps passe et je reçois un appel téléphonique d’un jeune homme me disant – sans réellement se présenter – être lecteur pour ladite entreprise. J’ignorais donc, lors de ce premier contact, avoir affaire à Franck Spengler, le fils de Régine Desforges, et qui est devenu depuis l’un de mes principaux éditeurs. Bref, ce monsieur m’assure que mon livre est formidable, que je vais recevoir une lettre de refus (!) dont je ne dois absolument pas tenir compte puisque, au contraire, il trouve ce livre formidable et tient à le faire paraître. Un peu abasourdie par cet avertissement contradictoire, je reçois la fameuse lettre et le manuscrit dans son enveloppe de retour. Puis plus rien. Déjà très contente d’avoir été ainsi « saluée » et ainsi distinguée, je range et oublie complètement tous ces documents dans un tiroir. Des mois plus tard, alors que je mets de l’ordre dans mes archives, je ressors l’enveloppe non décachetée du manuscrit. Je l’ouvre enfin et découvre une note de lecture très élogieuse sur mon livre à ceci près qu’il « est dommage qu’il soit si brouillon et mal tapé ». Je décide de faire retaper le texte en soignant la présentation, puis établis une petite liste d’éditeurs de bonne renommée auxquels j’adresse de nouveau ma Femme de Papier. Nouvelle réponse, sous forme de télégramme, cette fois, m’enjoignant de contacter les éditions Y. afin de prendre un rendez-vous… Le patron en personne m’invite à déjeuner ! Et là… ce fut la déconvenue totale : le monsieur s’imaginait que, au vu de ce que j’avais écrit, j’étais prête à passer à l’acte illico. Ce fut un moment très délicat du début de ma carrière ; je ne voulais absolument pas vendre mon manuscrit à ce prix-là, et puis c’était tout de même terriblement décevant. J’ai donc recouru à l’humour en lui demandant si en envoyant un livre de cuisine, il m’aurait demandé de lui faire un bœuf en daube ? La pirouette a fonctionné… Mais, d’un point de vue commercial, mon livre devait être adouci pour paraître chez eux. J’ai refusé. Monsieur Y. a donc transmis le manuscrit à Jean-Jacques Pauvert qui, à son tour m’a fixé un rendez-vous. Inutile, ai-je répondu, si c’est pour voir « la tête que j’ai ». Tel ne fut pas le cas, et j’ai enfin signé mon contrat.