Entre de bonnes mains

Le 03/01/2010

Je ne peux que le deviner. Dans la pénombre, la marée de son corps monte à l’assaut d’une berge immaculée. Baigné d’un soleil artificiel, le dos de mon amant semble frémir. Son masseur projette ses mains en pleine lumière et opère des passes hypnotiques à fleur de peau. Enivrée par les vapeurs du hammam et les senteurs épicées des huiles, je me laisse envouter. J’en viens presque à regretter mon choix...

Lors de notre arrivée, nous avons dû élire nos masseurs. Pour Rémi, la question fut vite tranchée ; pas question de laisser une autre femme faire du peau à peau avec lui. Pour moi, ce fut plus hésitant... J’optais pour une masseuse, autant pour équilibrer le quatuor que pour éprouver le contact troublant d’une autre féminité.

Pas le temps pour les regrets ! À l’instant où les mains masculines se posent sur le dos de Rémi, je sens une douce chaleur sur le mien. Comme en écho, une voix douce teintée d’une touche mutine : "Je suis Marie, laissez-vous faire." Je n’ai aucune envie de désobéir.

Je m’abandonne. À la sensualité du massage... À la vision du corps de mon amant, lui aussi pétri de bonnes sensations. Je n’en perds pas une miette, décelant peu à peu le mimétisme entre les mains que je vois et celles que je sens. Chaque oscillation du masseur s’accompagne de la sensation correspondante : même endroit, même force, même plaisir. Ballet synchronisé. Symbiose des sens, étrange sentiment de dédoublement... je suis massée et je me vois massée. Je suis moi-même, mais aussi ce corps allongé près de moi.

Je vois ces mains, je sens ses mains.

Elles effleurent, je frissonne.

Elles frictionnent, je m’échauffe.

Elle pétrissent, je me délasse.

Elles s’égarent, je me cambre.

Emportée par l’excitation, je ferme les yeux. Plus besoin de voir, je sais, je sens ce qui se passe dans nos dos. La polarité changeante des paumes m’électrise. Courant alternatif : nuque/dos, fesse/cuisse... hanche/sexe ! Le temps d’un frôlement, je ne peux réprimer un haut-le-cul. Instinct du plaisir, mon con déjà moite en veut plus. Marie a compris et s’y attarde. Sexe/nuque, sexe/dos, sexe/cuisse/rein/hanche... Mais comment fait-elle pour être partout à la fois ?

L’évidence me foudroie, deux mains n’y suffiraient pas !

Pas le temps de paniquer, la voix de Rémi me rassure : "Nous ne sommes plus que trois."

Soulagée, je me retourne et livre sans retenue mon corps à Shiva. Mais ce ne sont pas que des mains qui m’explorent. Marie m’enjambe pour poser ses lèvres fruitées sur les miennes. Leur saveur douce-amère m’invite à en goûter tout le suc. Chauffé à blanc, un tisonnier familier plonge dans les profondeurs de ma rivière souterraine. Je tangue, chavirée par l’un, enivrée par l’autre.

L’orgasme me saisit d’un coup, plus violent que prévu. Je mets plusieurs secondes à reprendre possession de mon corps qui, malgré le choc, en redemande. Rémi est encore raide, Marie a la nuit devant elle, tout est permis... ou presque.

L’amour à trois d’accord, mais pas question qu’elle touche à mon mec !

[gris]Archange[/gris]

Commentaires (1)

  • Jude

    J’aime beaucoup ! Et le coup de plume et le fantasme qui est tout à fait à mon goût ! Bravo.