Une belle découverte

Le 12/04/2009

Anna était en pleine discussion avec son contremaître, quand Souakim se mit à l’appeler en criant d’une voix exaltée. « Mistress ! Mistress ! » D’un bond la belle archéologue se jeta dans le trou creusé au milieu de l’ancienne nécropole des rois du Soudan et elle vit Souakim tenant dans ses mains un objet cylindrique recouvert de boue séchée, qu’aussitôt il lui tendit. « Je l’ai trouvé là, Mistress, regarde… ». Avec son index, le jeune Africain désignait un emplacement à ses pieds où d’autres objets enfouis affleuraient du sol. Le garçon avait visiblement découvert un gisement intéressant…

Les autres fouilleurs, qui s’activaient dans les fosses voisines, abandonnèrent sur-le-champ leur besogne pour venir voir. Le cliquetis des pelles et des pioches s’interrompit pour laisser place à un silence intrigué. On s’interrogeait en chuchotant. Qu’avait trouvé ce maudit Souakim ? Autour du trou une trentaine de bouches édentées ricanaient d’un air sournois. Car chacun, en son for intérieur, espérait que la découverte de Souakim ne serait qu’un faux espoir, nombreux étant ceux qui, depuis le début du chantier, se moquaient de l’inexpérience et de la présomption du jeune Soudanais. Les vieux indigènes en particulier le méprisaient pour sa fierté, pour sa liberté de ton. Quelle gifle pour leur orgueil si ce que ce dernier venait de déterrer comblait enfin les attentes de la patronne ! Adieu la prime. Elle irait dans la poche de ce vaurien !

La chaleur, en ce début d’après-midi, avait atteint son paroxysme. Une sueur acide, à laquelle se mêlaient la poussière et le sable charriés par le vent du sud, aveuglait Anna. Elle peinait à nettoyer l’objet. Plusieurs minutes lui furent nécessaires avant qu’elle n’en distingue l’exacte nature. L’étrange cylindre mesurait approximativement une vingtaine de centimètres et se terminait par une protubérance caractéristique. Il s’agissait d’un phallus en pierre, probablement très ancien. Sans doute les peuples de l’Antiquité, qui vénéraient l’organe viril, avaient-ils dû s’en servir lors de cérémonies religieuses... Anna présenta l’ithyphalle au soleil. Elle voulait mieux l’analyser, en étudier les symboles gravés à la surface. Mais une rumeur traversa aussitôt le groupe des fouilleurs. Un mot fut lancé, qu’elle ne comprit pas. Une hilarité générale s’ensuivit. Après quoi tous les hommes se précipitèrent dans la fosse. Tout en dansant d’une manière obscène ils déterraient les autres objets encore enfouis en se les disputant hargneusement. Ceux qui avaient eu la chance de trouver une verge de pierre se la mettaient entre les cuisses pour mimer les gestes du coït devant Souakim.

On riait, et l’on hurlait des sarcasmes à l’adresse du jeune homme qui, plus pâle qu’un mort, recevait l’affront collectif en versant des larmes amères. Anna était effarée. Elle cherchait désespérément à stopper cette farce stupide qui risquait de détruire les précieux vestiges. Mais ses objurgations se perdirent dans le désert. Seuls les coups de fouet d’Hakim, le contremaître, parvinrent finalement à calmer les hommes que la rage d’humilier le petit Soudanais rendait incontrôlables. Pour ces êtres frustes rien n’était plus risible, plus grotesque, que cette découverte d’un lot de pénis en pierre ! C’était le comble du comique ! Ah ! Souakim était décidément un fouilleur sans pareil ! Et dire que, quand il avait crié à la patronne de venir, on aurait cru qu’il avait mis au jour la tombe d’un pharaon ! Les vieux n’en finissaient pas de l’imiter en se tordant de rire : « Mistress, Mistress ! » Et, à la fin de la journée, on entendait encore, dans les fosses, résonner ces deux mots suivis de gloussements sarcastiques. Souakim, quant à lui, après cette scène, s’était remis à travailler en contenant stoïquement son ressentiment et ses larmes.

S’étant réfugiée sous sa tente après y avoir emporté tous les objets découverts, Anna travailla jusqu’à la nuit tombée. La qualité des pièces exhumées, intactes malgré le traitement qu’elles venaient de subir, la transportait de joie, et déjà elle pensait à la réaction du professeur Favre, son directeur de recherches, qui, retenu à Paris, devait arriver dans quelques jours. Quel ne serait pas son enthousiasme devant de tels vestiges ! La jeune archéologue datait les ithyphalles du premier siècle avant Jésus-Christ. Selon ses premières conclusions, ils pouvaient se rattacher au règne de la reine Candace, souveraine nubienne dont l’empire s’étendait de l’Ethiopie jusqu’à la haute Egypte. Et plongée dans l’étude des sexes sculptés, Anna se prenait à rêver à l’existence de cette monarque noire, dont le pouvoir était aussi absolu, dit-on, qu’était grand son goût des hommes. Les reproductions qu’elle manipulait attestaient bien en effet de ce culte que la princesse vouait au phallus.

Des siècles après leur création, leur beauté demeurait intacte…et d’un charme érotique toujours très efficace ! A leur contact Anna s’excitait singulièrement, et la fatigue, la chaleur étouffante, contribuaient à accentuer encore cette ivresse sensuelle qui la gagnait peu à peu. Elle eut beau tâcher de se ressaisir, c’était plus fort qu’elle. Des images d’orgies antiques se projetaient devant ses yeux. Elle voyait la superbe reine nubienne au milieu d’un parterre de mâles en érection, puis utilisant ces mêmes mâles dans les positions les plus extravagantes. Et elle croyait vraiment qu’elle assistait à une scène authentique, que, dans ce qu’elle voyait, son imagination n’avait aucune part ! Quand elle se rendit compte qu’elle fantasmait, elle en fut presque honteuse. Son sexe et tout son corps étaient en feu. « Quel délire ! » Savait-elle seulement si cette divagation avait duré une minute, ou deux heures ? Dans l’absorption de sa rêverie elle avait perdu toute notion du temps ! Et elle se félicita de ce que nos petits égarements mentaux restent par bonheur inaccessibles à autrui. Car qu’aurait-on pensé d’elle autrement (et dans ce « on » se trouvait en premier lieu le digne professeur Favre !).

Eprouvant soudain un pressant besoin de se laver et de tranquilliser ses sens, la jeune femme s’empara de sa trousse de toilette et se dirigea vers l’installation sanitaire bâtie à côté du campement. La nuit était calme. Le vent s’était apaisé. Elle aperçut au loin le feu des fouilleurs dont les rires et les chants se mouraient dans le désert. Elle savait qu’à cette heure la douche était toujours vide. Elle avançait, s’éclairant avec sa lanterne sourde qui rayait l’obscurité d’un jet pâle. La sueur de nouveau coulait abondamment sur sa peau. Ses tempes bourdonnaient. Une tension douloureuse, que l’oppression de la chaleur n’expliquait qu’en partie, asservissait son corps, et elle se languissait d’arriver. Mais en approchant elle vit une lumière, elle entendit le bruit des gouttes qui tombaient sur le sol, et elle comprit qu’un homme avait eu la même idée qu’elle. Par conséquent, il lui fallait attendre. Attendre ! Alors que montait dans tout son corps une impatience irrépressible, insoutenable, une rage exaspérante ! Il lui fallait une douche, et immédiatement ! Les coulées de sueur qui ruisselaient de sa tête à ses pieds lui étaient devenues insupportables. Elle avait l’impression que ce déluge de sécrétion ne prendrait jamais fin, qu’elle allait finir ses jours en état de sudation chronique. Chaque minute, chaque seconde d’attente la mettait au supplice. Aussi, ne put-elle résister au besoin de savoir si le mystérieux indélicat en avait encore pour longtemps. Un simple coup d’œil entre les planches disjointes de la cabine de fortune suffisait pour se renseigner… Mais il y avait un autre motif, une envie moins avouable, qui la guidait également : l’étrange nécessité de contempler un homme nu ! Peu importait le physique ou l’âge de cet homme. L’essentiel était qu’il possédât entre les cuisses un exemplaire vivant de ce qu’elle avait palpé pendant des heures dans une version pétrifiée. Oui, elle souhaitait maintenant regarder ça en vrai, pour la beauté de la chose !

Une inspection rapide des environs l’ayant assurée que personne ne pouvait la surprendre dans cette coupable posture, l’archéologue plaqua son œil droit contre une des fentes qui donnaient sur la douche. D’abord elle distingua un dos plein de savon. Puis un visage : celui de Souakim ! La tristesse et le mal-être qui se lisaient dans ses traits lui rappela immédiatement qu’elle ne s’était guère souciée du pauvre garçon après l’humiliation qu’il avait endurée. Elle ne l’avait même pas encore remercié ! Sans doute le jeune homme croyait-il qu’elle ne lui donnerait aucune récompense, que ce qu’il avait découvert était effectivement sans valeur ? Comment avait-elle pu être aussi inhumaine ? Désormais une irrépressible impulsion la poussait à rejoindre le jeune Soudanais sous la douche. C’était un de ces réflexes qui font fi des convenances, un élan du cœur. Souakim souffrait. Or cette souffrance, dont en partie elle se trouvait responsable, elle désirait l’abolir par un don de tendresse ! Quoi de moins raisonnable ? Mais quoi de plus naturel !

Quand il vit entrer la jeune Française dans l’étroite cabine en bois l’étonnement de Souakim fut immense, mais moins immense que son plaisir lorsque Anna commença à le caresser tout en le savonnant. Emu et très gêné, il contemplait le corps nu de sa « Mistress » avec une telle fascination, un tel respect, qu’elle dut quasiment le forcer à lui rendre la pareille ! Souakim avait des gestes d’une candeur extrême. Il massait les seins d’Anna comme s’il se fut agi de deux fétiches de chair aussi impressionnants que délicieux. L’archéologue se concentrait, pour sa part, sur le sexe timide du garçon. Elle le sentait grossir sous la pression habile de ses doigts, et, un brin vicieuse, hâtait son durcissement par une savante manipulation des testicules… Souakim ne tarda pas à gémir. Descendant le long du torse nerveux et chaud que trempait la pluie tombant du robinet surélevé, Anna le prit alors dans sa bouche. Maintenant le sexe du Soudanais déployait toute son ampleur. Il était très gros, et d’une taille qui paraissait démesurée… Quant à sa chair, elle était si savoureuse ! Le gland, notamment, se révélait d’une douceur, d’une sensibilité… exquises… Et en le flattant avec sa langue Anna ressentait des émotions vraiment indescriptibles ! Que c’était bon, mon Dieu… Accroupie, elle avait glissé sa main droite entre ses cuisses, et, pendant que, de la gauche, elle continuait de jouer avec les boules viriles de son partenaire, elle doigtait et patinait avec dextérité son propre sexe, se donnant ainsi un plaisir double. Les mains fines de Souakim malaxaient ses cheveux gorgés d’eau et de savon. La volupté de se sentir ainsi lavée amplifiait la plénitude qui la transportait. Il lui semblait qu’elle se dissolvait sous l’action de l’eau, de ce sexe dans sa bouche, de ses doigts enfoncés en elle, que son corps, si pesant tout à l’heure, était devenu plus léger que l’air, et que, s’envolant, il allait bientôt l’emporter vers des régions supérieures où la vie, délestée de toutes les contingences qui l’écrasent, ne consiste plus qu’à éprouver une jouissance sans fin et sans limites.

Quand s’épancha entre ses lèvres la sève brûlante de Souakim, Anna fut prise d’un spasme dément. Ses cris furent heureusement couverts par le tumulte des fouilleurs. D’incoercibles secousses la traversaient qui semblaient ne jamais devoir finir. Puis son corps s’apaisa. La tête enfouie entre les cuisses de son partenaire elle reprit progressivement le sens du réel, s’adonnant à une longue caresse des fesses fermes et harmonieuses auxquelles ses mains s’étaient agrippées. Elle embrassa ensuite le jeune homme sur la bouche, lui dit qu’il ne faudrait jamais parler de ce qui venait de se passer, et s’en retourna sous sa tente. Les verges de pierre l’attendaient sur sa table de travail. Elle les examina à nouveau, et à nouveau, semblable au serpent subtil et séducteur de la Bible, la fièvre du désir s’insinua dans son esprit, s’empara de sa chair. Sans doute y avait-il là une espèce de sortilège ? Cependant, en tant que scientifique, Anna ne croyait guère au sortilège, et puis elle se connaissait trop. « J’aime trop les hommes pour rester insensibles devant ces objets », constata-t-elle plus rationnellement. Et, sur son lit de camp, derrière sa moustiquaire, avant de s’endormir, la jeune femme se masturba longuement, d’abord en pensant au professeur Favre dont les grandes et belles mains l’excitaient beaucoup, et puis à d’autres hommes, réels ou imaginaires, dont les vits complaisants s’offraient à elle pour contenter ses désirs les plus inavouables dans une ronde vertigineuse et orgasmique qui, par delà le sommeil, se continua jusqu’au matin.

Axelle Rose

Commentaires (3)

  • Dora B.

    Moi qui ai tant aimé Le Roman de La Momie, je ne peux rester insensible.

  • Pierre Eiffel

    Le style est plus envoûtant que la volupté qui emporte l’héroïne.
    L’instrument de séduction le plus évolué n’est-il pas le verbe ?
    Merci.

  • jdAMuLhyiISXHjZlM

    Now I feel suptid. That’s cleared it up for me