Les X-Plicit Films : Au plus près du désir féminin

Le 09/03/2009

Sur Second Sexe, nous nous sommes donné pour objectif d’essayer de satisfaire toute interrogation liée à la sexualité de la femme. Certaines de ces interrogations sont liées au désir suscité par l’image. Entre le film érotique, dont les scènes sont effleurées et les gros plans gommés, et le film pornographique dont les paramètres sont exclusivement masculins, quelle place y a-t-il pour le désir féminin ?

Un genre mâle

Force est de le reconnaître : la pornographie est faite par des hommes, pour des hommes. "Trilogie de la béance, de la jouissance et de la signifiance, le porno n’est une promotion si exacerbé du féminin jouisseur que pour mieux enterrer l’incertitude qui planait sur le « continent noir » [la femme selon Freud]." (1) Le philosophe et sociologue Jean Baudrillard, qui a étudié la question, permet de mieux comprendre pourquoi les femmes se sentent exclues de la pornographie. La multiplicité des gros plans, mettant en scènes des morceaux de corps rendus abstraits, réduit à néant l’érotisme de la chair. Fesses et seins sont présentés à profusion. Mais la caméra ne s’attarde jamais sur le galbe d’un pied ou la finesse d’une nuque, dont l’aptitude à susciter le désir est pourtant loin d’être inexistante.

Femmes à vendre

C’est bien le corps féminin qui est le centre d’attraction de la pornographie. Que ce soit sur Internet ou dans les rayons d’un sex-shop, sa fragmentation selon différents critères - blondes, rousses, gros seins, etc. - s’adresse avant tout aux désirs des hommes. Imagine-t-on des étals vantant larges pectoraux, cheveux frisés ou pénis de taille moyenne ? Surtout, imagine-t-on qu’un tel morcellement séduirait les femmes ? Ce n’est pas le but. Seul impératif auquel doivent répondre les hommes dans les films X : tenir leur érection. Alors que les femmes se doivent d’être belles, selon les canons chirurgicaux en vigueur, de se cambrer en battant des paupières et de tenir leurs cheveux pour ne pas cacher la fellation qu’elles sont en train d’exécuter. Aucune identification possible à travers ces personnages factices, cloîtrés entre les panneaux d’un décor de carton-pâte. Et quelle excitation possible pour une femme, lorsqu’une greluche minaudant se transforme en chienne en chaleur, un quart d’heure après avoir rencontré un mâle en rut, et feint un orgasme qui ne trompe personne, seulement après quelques minutes ?

Les élans du grand écran

Sexe et cinéma ne font pour autant pas toujours mauvais ménage. A côté des graveleux American Pie et autres Sex Academy pour adolescents bourgeonnants, nombreux sont les films qui osent avec talent la confrontation entre septième art et septième ciel. Initiateur du genre, Andy Warhol a flirté avec la pornographie dans les années 1970 en montrant dans son expérimental Blow Job l’émoi du visage d’un homme recevant une fellation. Outre ce sibyllin projet, plusieurs films mythiques ont franchi le cap du plaisir charnel. Dernier tango à Paris, L’Empire des sens, Caligula, Eyes Wide Shut ou encore Basic Instinct démontrent que le plaisir des femmes est bien moins négligé dans le cinéma traditionnel que dans les films pornographiques. Lars Von Trier n’a pas apporté à cet édifice la moindre de ses pierres en créant Zentropa, société de production de films au credo féminin, suivant les principes du Puzzy Power Manifesto, établi par des femmes. Exigeant une montée progressive du plaisir, un vrai scénario et l’absence de violence - excepté si elle s’inscrit dans le cadre d’un fantasme féminin -, l’entreprise (rebaptisée depuis Innocent Pictures) a proposé des réalisations à succès telles que Pink Prison, Constance ou encore All About Anna.

Pornographie : place aux femmes !

Face à la volonté de représenter des scènes de sexe en respectant des critères esthétiques, nombre d’artistes masculins réagissent en affirmant que la démarche désamorcerait tout érotisme. C’est un point de vue d’homme qui n’a pas empêché plusieurs femmes issues du milieu de la pornographie de contribuer à la naissance d’une pornographie féminine, notamment aux Etats-Unis où elle a vu le jour en suivant une logique féministe, dans les années 1980. A l’instar d’Annie Sprinkle, sex-performeuse mettant en scène la masturbation, qui cherche à libérer la jouisssance des femmes. Ou de Candida Royalle, d’abord actrice puis productrice et réalisatrice, qui a filmé plus d’une vingtaine de longs métrages X et obtenu de nombreuses récompenses. Pionnière, son exemple a depuis été suivi à travers le monde par Petra Joy, Erika Lust, Jazmin Jones, ainsi qu’en France par Ovidie ou Coralie Trin Thi. Mais c’est surtout en matière d’homosexualité que la production de films féminins a été la plus prolifique. Et si les festivals gays et lesbiens soutiennent leur diffusion, il n’en va pas de même pour les films féminins hétérosexuels, nettement plus confidentiels. Pour autant, quel que soit l’objet du désir mis en scène, le développement de cette pornographie au féminin est source de réjouissances. Il donne l’occasion aux femmes de mieux comprendre leurs corps, leurs désirs et d’avoir un aperçu de la diversité du plaisir que connaît leur sexe. Il permet aussi d’en finir avec "la scission radicale des deux images du féminin : la maman et la putain", pour reprendre Nancy Huston (2). Caler le rythme du film du film sur la progression du désir des femmes, respecter des critères esthétiques, en un mot, se mettre au service des fantasmes des femmes, c’est l’objectif que s’est fixé Second Sexe en se lançant dans la production des X-plicit films. Mais qu’est-ce qu’un X-plicit film ?

L’X-plicit film répond à un manque qui n’a pas encore de définition.

L’X-plicit film est tourné vers le désir de la femme et ses fantasmes et son rôle consiste à stimuler sa libido qu’elle soit seule à le regarder ou en couple. Les réalisatrices choisies par Second Sexe pour ce projet, reconnues pour leur œil artistique dans le monde du cinéma, du théâtre, ou de l’art, n’auront de cesse poser des questions légitimes sur la sexualité féminine de filmer des scènes de sexe avec de jolies lumières, des atmosphères sophistiquées, et des acteurs et actrices naturels dont les sensations justes jettent le trouble sur les spectatrices. Comme dans la littérature féminine, elles montrent le sexe dans sa réalité, dans un monde exempt de performance (par opposition aux films pornographiques). La tendance du cinéma va également dans le sens des X-plicit films. Portier de nuit de Liliana Cavani, La Leçon de Piano de Jane Campion ou Lady Chatterley de Pascale Ferran sont au plus près du désir féminin, mais peut-être ne peuvent-ils pas aller au bout de son expression dans un circuit de distribution classique. Un cinéma pornographique d’auteur Les X-plicit films, d’une durée de 10 à 30 minutes, axés sur la sexualité féminine dans toute la variété qu’elle propose, offrent aux femmes un cinéma d’auteur dans lequel leur désir, leur plaisir et leur libido sont au centre de la proposition. Vous désirez ? de Caroline Loeb, Enculées de Laetitia Masson, Peep-Show Heros d’Héléna Noguerra, Le bijou indiscret d’Arielle Dombasle, Se Faire Prendre au Jeu de Lola Doillon et A ses Pieds de Mélanie Laurent sont les six premiers X-plicit films. Les réalisatrices, enthousiasmées par le projet, n’ont pas hésité à se jeter à l’eau autant en tant que femme qu’en tant qu’artiste. Elles sont aux prémices d’une toute nouvelle manière de mettre en scène la jouissance.

Parce que les femmes ont droit à un cinéma pornographique qui porte dignement ce nom et qui s’adapte véritablement à leur désir, parce que l’art et le sexe forment souvent un beau couple, parce que l’esthétique ne nuit pas à l’érotique, il est temps que les X-plicit films lancés par Second Sexe aident à combler un vide qui perdure, tant d’années après la libération sexuelle.

Constance de Médina et Sophie Bramly

Les X-plicit films sont disponibles en téléchargement sur Second Sexe.

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Commentaires (9)

  • Marc

    Je trouve ce film génial

  • Manuel Garcia

    Bravo ! C’est ainsi que le sexe devrait être raconté, c’est j’espère, le début d’une très longue série ! C’est, je pense, une attente de beaucoup d’homme aussi ;)

  • Gwoko

    Comment peut-on les télécharger ? Merci

  • tee

    Moi non plus je vois pas comment on fait pour les telecharger ! quelqu’un pourrais me le dire ! merci

  • duboutdesdoigts

    Dommage que cette rubrique ne soit plus accessible notamment avec des films, des guides, conçus par des femmes pour lesquels la sensualité éprouvée nous amène vers des sensations d’extase et de découverte……….le plaisir à fleur de peau délicat et subtile

  • duboutdesdoigts

    A quand le retour de second moi et des films conçus par des femmes ...

  • Fred

    Pour ce que j’ai pu en voir (ils sont malheureusement très durs à trouver maintenant...), si c’est ça le film X féminin, vive le film X féminin ! Ils combleront aussi beaucoup d’hommes lassés par la laideur des décors et la stupidité du jeu d’acteur de films X traditionnels.

  • jIjfWSCUekIYrC

    Comme d’ hab. JMN nous fait une ptiete déprime quand il y a un gros b….( bazar ) chez Ségoléne en Poitou-Charentes… !!

  • Thierry

    Qui pourrait me dire comment télécharger les films ? merci d’avance.