La levrette et le boa

Le 20/12/2009

Ce jour-là, il y avait une promo au rayon exotique, ou alors ils avaient décidé de récompenser les clientes fidèles, car je tombais en arrêt :

Latinexpress, sourire ravageur, longs cheveux de jais et crucifix autour du cou, version masculine de la bomba latina. Il doit y avoir un vice caché, c’est un gigolo, une contre-façon, un fake pour que je renouvelle mon adhésion. Mais non, l’inscription est gratuite. Alors ?

Je me lance, je n’ai rien à perdre, que du temps, ici ou ailleurs (et ailleurs, ce sera devant ma télé, peut-être "Relooking Extrême" ou un documentaire animalier, donc il n’y a pas à hésiter).

Moi : "Je vous veux. Je vous prends, je vous caresse de haut en bas et en plus, après, je vous dis merci."

Lui : " Vous m’aurez, c’est sûr. Où vous voulez, Quand vous voulez, c’est garanti après achat."

La vie est si simple dans le monde virtuel.

Sauf que moi, je suis prête pour un plan hyper classique, toi venir chez moi, bonjour, la découverte, ta peau contre la mienne. Le risque est déjà monstrueux, ils ne se rendent pas compte. Mais il leur faut de l’inédit, du piment, du frisson XXXL !

Et Latinexpress voulait m’en mettre plein la vue.

"...tu as laissé la porte entrouverte, tu m’attends dans une pièce, posée sur tes mains et tes genoux, en position levrette.Mais attention, lis bien ce qui suit : tu as le dos tourné et tu ne dis plus un mot à partir de là. Je t’ai trouvée, tu sens un parfum masculin, tu es rassurée. Mes mains caressent délicatement ton corps des pieds à la tête, tu as les yeux fermés, tu sens mon souffle sur ta nuque. Puis je me mets face à toi, tenant ton visage dans mes mains, je m’approche, je t’embrasse sur la commissure de tes lèvres douces qui m’appellent, tu n’en peux plus, tu veux ouvrir les yeux, mais tu tiens le coup...Doucement, je me déshabille, tu es toujours dans la même position, je me retrouve nu. Et, tel un boa, je parcours ton corps par dessous, dessus, devant, derrière. Pour enfin me retrouver sous toi, toi au dessus de moi. Et je te serre tout contre moi, mes mains s’approchent de tes yeux pour enfin les ouvrir. Et là s’ensuit un long moment d’échanges en tout genres, blablabla..."

Je fastforward la suite. Je ne comprenais pas tout de cette séance à géométrie variable. Le boa, j’étais pour, la levrette, passe encore, mais les yeux fermés, non, je trouvais cela angoissant, la peur et le plaisir, pour moi, ne font pas bon ménage. De plus, je le soupçonnais de m’avoir envoyé un copié-collé. Cela ne pouvait être qu’un avatar, téléguidé par un webmaster pervers.

Je décidais de reprendre la main :

- Et si on inversait les rôles ? Je peux laisser un foulard à ma porte et te guider quand tu auras les yeux bandés. J’en ai un rouge très joli.

- Arrivé à ton étage, je sonnerai et me tournerai le dos à la porte, ainsi TOI tu me mettras le foulard...Ca te va ?

Il a sonné, il avait le dos tourné, je lui ai bandé les yeux, rouge sur noir, c’était magnifique. Un métis latino-indien, très décoratif, vraiment, vêtu de satin et de velours, le bouc stylisé, et qui , loin d’afficher l’arrogance que je redoutais, se montrait ému et maladroit.

Je le plantais au milieu de la pièce. Je tournais autour de lui, jouant de l’effet de surprise pour lui prodiguer caresses et baisers tout en le déshabillant. Sa peau était une splendeur dense et soyeuse, ambrée, fraîche. Je n’avais jamais rien touché de pareil. La mienne, à côté, me faisait penser tout d’un coup à du carton bouilli. Sa chevelure m’inondait, j’aurais voulu en enrouler les mèches autour de mes poignets et restées arrimée à lui par cette matière sauvage et souple.

Quand il fut nu, son sexe obscène, épure bleutée reposant sur son ventre, m’attira irrésistiblement. Puis l’oeillet finement froncé de son trou du cul me happa la langue avec passion. Prosternée , le nez entre les fesses admirables de cet inconnu, je rendais grâce à Sainte Rita, patronne des causes perdues, et à d’autres saints bien moins catholiques.

Bon, c’est vrai, il n’est pas très présentable. Lui, c’est quand même écrit "sex-toy" dessus et si on sort ensemble, cela me mettra encore plus la honte que le canard vibrant en laisse. Mais pour l’heure, il était mon Jésus, j’étais sa Madonna.

[gris]Dora B.[/gris]

Commentaires (1)

  • Claire C.

    Je trouve cela merveilleux.